Discours d’inauguration de l’exposition au MAMCO

Je remercie la direction du MAMCO qui très aimablement a organisé l’exposition de mes oeuvres.

Je remercie tout particulièrement Monsieur Julien Fronsacq qui a fait le choix et qui a aussi fait la disposition, l’organisation, la présentation de mes œuvres que vous verrez au 4ème étage. Je remercie aussi Monsieur Albert Garnier qui s’est occupé aussi de l’organisation, du transport au nom du département du patrimoine comme il vient de vous être indiqué actuellement où toutes mes oeuvres sont rentrées etc.

Alors, je voudrais d’abord rassurer tout le monde sur ma propre architecture, parce que certains croient que c’est une architecture complètement lalu, gratuite, esthétisante, et puis, pour certains, je serais inspiré des troglodytes de Cappadoce. Alors, je trouve tout cela très étrange et je pense qu’il y a des personnes qui ne font pas la différence entre une vache et une automobile.

Alors, mon histoire est très ancienne. Elle remonte à 1944, c’est à dire que j’avais 7 ans à l’époque. Mon père m’avait installé dans une petite chambre qui n’avait pas été refaite depuis longtemps, je ne dirai pas le qualificatif qui me vient à l’esprit, mais enfin, tout ceux qui ont l’esprit rablaisien comprendront d’eux-mêmes. Et puis cette petite chambre avait un plafond assez triste et puis un petit lustre qui lui, n’éclairait que le plafond. Il faisait froid, c’était l’hiver, en 1944, comme je viens de le dire, donc, il y avait des restrictions ce qui risque de nous arriver aussi. Enfin, bref, j’avais un jour essayé de monter sur une chaise, puis sur une table, et j’avais moins froid aux pieds et un peu plus chaud à la tête. J’en ai conclu que le plafond était une très bonne invention et que pour vivre confortablement, il fallait s’installer au plafond puisqu’il y avait la lumière et la chaleur. Et je pensais qu’effectivement, préalablement il aurait fallu faire une école de cirque. Donc, j’ai renoncé à ce système. Mais je me sentais terriblement prisonnier, dans une boîte, dans une petite boîte. Alors ce plafond qui délimitait ces quatre murs qui eux-mêmes étaient  reliés par des angles assez désagréables parce qu’évidemment toujours un peu sales, parfois même paradis des araignées, faisait que j’ai pris en grippe les surfaces planes et les angles. Alors, le temps a passé bien entendu, et puis, je m’étais juré que, dans l’avenir, jamais plus je ne vivrais dans ces conditions-là. Si bien que, mes études étant passées, j’ai eu la chance de trouver un premier client dans le midi sur la commune du Tignet qui m’a demandé la réalisation d’une villa, une villa traditionnelle dans le style de la région, c’est à dire provençale. Alors j’ai étudié cette construction au fur et à mesure qu’elle se faisait, très très en détail, c’était du vrai taylorisme à l’échelle de l’architecture. Alors, quand vous pensez seulement, pour prendre quelques exemples, les briques, les tuiles, bon, il faut déjà sélectionner la terre, il faut la malaxer, il faut la mettre dans des moules, il faut attendre que ça sèche, il faut ensuite les faire cuire, il faut les stocker, il faut ensuite qu’un camion vienne pour les chercher depuis le chantier, sur le chantier, on les re-stocke, et ensuite, on les prend une par une pour les mettre en place jusqu’au moment où vient un vrai grand vent et où ces tuiles comme vous le savez, partent comme des papillons dans l’espace. Je crois que si on fait le calcul de tout cela, on arrive à des choses totalement aberrantes qui, aujourd’hui, seraient difficilement justifiables à grande échelle vu le temps, l’énergie, les matières etc. que ça représente. Aujourd’hui nous sommes à un grand tournant, et, comme vous le savez, sur le plan énergétique, comme sur les autres plans, il faut que les architectes s’organisent et créent une nouvelle architecture. On ne peut plus continuer sur des réseaux trop traditionnels, des techniques et des moyens trop traditionnels quoi, enfin, ce qu’on a l’habitude de faire. Donc on a toute une nouvelle grammaire architecturale à trouver pour répondre à ce qui nous attend demain. Nous voyons déjà que, sur le plan climatique, les changements sont considérables, et que je trouve toujours très triste que dans des régions où vous avez des grands vents, des ouragans, tout est démoli. Une fois que tout est démoli, on recommence, on reconstruit la même chose. Il y a déjà plus de cinquante ans que j’avais proposé pour ces régions, des architectures aérodynamiques. Donc l’architecture pourra évoluer que dans la mesure où il y aura une recherche sérieuse pour ce faire. C’est la raison pour laquelle, dans une première étape, j’ai créé un Prix International d’Architecture pour la recherche et l’innovation, prix qui s’appelle le Prix de Genève qui a eu un très grand succès, un très grand retentissement puisqu’à la première session, nous avons reçu plus de 250 dossiers, l’année dernière, à la deuxième session, nous en avons reçu plus de 500. Donc, je pense qu’il y a quelque chose à faire sur le plan de la recherche, sur le plan de la centralisation de ces recherches et de ces innovations et je pense que Genève serait très bien placée pour devenir la capitale de la recherche architecturale mondiale. D’autre part, une autre idée m’était venue. Nous avons des associations, de bienfaisance etc. etc. mais pourquoi pas une association qui serait tout simplement  : «  Architecture sans Frontières  ». C’est à dire une équipe d’architectes novateurs, ingénieurs et autres qui auraient la possibilité de venir en aide soit à des particuliers soit à des communautés, des villes ou des pays pour proposer des formules nouvelles, pratiques, économiques, etc. en cas de destructions, soit naturelle, soit par la guerre etc. et je crois que cette organisation pourrait dans beaucoup de cas permettre de prévenir et de développer l’architecture du futur. Ensuite je pense que nous n’allons pas en rester au prix de Genève, nous allons aller encore plus loin, ce sera le but de mes prochaines recherches et de mes prochaines réalisations. Enfin bref, j’aimerais aussi vous dire que mon grand désir est de trouver une nouvelle architecture qui soit conforme aux besoins d’aujourd’hui bien sûr, qui puisse s’intégrer parfaitement dans tous les types de nature, qui soit économique, qui soit protectrice, et qui soit, évidemment à la portée de chacun. Je rêve d’une architecture vivante, d’une architecture, je dirais même, sensuelle où toutes les cadences, tous les mouvements de ces architectures pourraient inspirer une mélodie à chacun. Je souhaite et je rêve toujours d’une architecture vivante que le soleil ferait sourire, que le vent caresserait, que la pluie ferait clignoter, scintiller, et que la nuit lui réserverait tout son génie et tous ces mystères.

Daniel Grataloup, le 13 Septembre 2022 à Genève.